Laure Leroux de Bauffremont

Laure Leroux naît à Paris le 2 août 1832 dans une famille aisée et cultivée, dont elle est enfant unique. Orpheline de père à 17 ans, sollicitée par sa mère et ses proches inquiets pour son avenir de très riche héritière, elle épouse le prince Roger de Bauffremont, descendant d’une ancienne famille noble et conservatrice.

Son expérience d’épouse et de mère est tourmentée, bien que soutenue par une délicate sensibilité et une grande piété religieuse.

Sa relation matrimoniale difficile, aboutit avec souffrance à la séparation, et ne l’empêche pas de rester ouverte à la recherche de Dieu dans le désir ardent de comprendre et de répondre à sa volonté. Après plusieurs tentatives de résoudre ses attentes, en octobre 1859 elle rencontre providentiellement à Venise le ministre provincial des frères mineurs, le père Gregorio Fioravanti, originaire de Grotte di Castro dans la province de Viterbo. En fréquentant le religieux, elle parvient à instaurer la confiance et l’entente avec lui, jusqu’à lui exposer son intention de fonder une famille religieuse féminine : celle qui deviendra la congrégation des sœurs franciscaines missionnaires du Sacré-Cœur. Pour cette institution, en effet, Laure Leroux est un véritable instrument de l’œuvre divine, un « canal en terre cuite », comme se définit elle-même, faible mais à la fois tenace, à travers lequel la volonté de Dieu peut se manifester pour de nombreuses âmes et avant tout pour celle du Père Gregorio. C’est lui qui comprend, et d’après un temps d’incertitude, accepte se placer avec amour et foi aux côtés de la jeune et pieuse parisienne, à présent mère M. Joseph de Jésus, pour la conseiller et la guider avec sagesse et humilité, afin que son projet courageux prenne forme et se réalise concrètement.

 Ainsi, le 21 avril 1861 à Gemona del Friuli, accompagnée de 53 jeunes filles, elle peut assister avec enthousiasme joyeux à l’ouverture canonique de l’Institut, dont la fondation a été approuvée avec un décret archiépiscopal le 14 novembre 1860.

Le début glorieux de la nouvelle fondation connaît, cependant des difficultés et des controverses considérables, mettant à dure épreuve la santé et la sérénité da la jeune fondatrice, qui doit (1863) décider douloureusement de laisser l’œuvre dans les mains de son de son fidèle collaborateur, père Gregorio Fioravanti.  Après avoir suivi de loin sa famille religieuse, à la fin elle se trouve contrainte malgré elle, de la quitter tout en la confiant toujours aux soins du père franciscain. Pendant sa vie elle conserve dans le secret de son cœur, un lien profond avec l’institut jusqu’au moment où elle trouve la paix dans la rencontre avec la sœur mort, qui la rejoint, à Monte-Carlo dans la principauté de Monaco, le 3 avril 1917.

 

 

Père Gregorio Fioravanti

Père Gregorio naît à Grotte di Castro (Viterbe), sur les rives du lac de Bolsena, le 24 avril 1822. La religiosité et l’esprit de sacrifice de ses parents représentent les premiers éléments de sa formation. Il manifesta très vite sa vocation pour la vie religieuse. Accueilli parmi les franciscains mineurs d’Orvieto, il en revêt l’humble bure le 5 février 1838. Il complète sa formation sacerdotale à Viterbe et à Rome ; il est ordonné prêtre le 17 mai 1845. Licencié en philosophie et théologie, il est envoyé comme “lecteur en Théologie sacrée” à Venise, dans le couvent de San Francesco della Vigna. Sa renommée pour la doctrine, son observance fidèle et son zèle apostolique se répand très vite dans la vaste province vénitienne Saint-Antoine des frères mineurs. Appelé à exercer des services délicats, il est élu ministre de la même province (27 octobre 1856).

Durant ce mandat (octobre 1859), il rencontre la Duchesse française Laure Leroux de Bauffremont, qui lui confie son projet de fonder un institut religieux féminin, franciscain et missionnaire. Prudent, sage et très obéissant comme il était, il discerne avec ses supérieurs légitimes la proposition originale et la volonté de Dieu, qu’il accueille par la suite avec une générosité héroïque. Il se place alors, pleinement disponible et humble, aux côtés de la Duchesse enthousiaste, avec laquelle (21 avril 1861) il ouvre officiellement l’institut des “Franciscaines Missionnaires du Sacré-Cœur”, à Gemona del Friuli (Italie).

Deux ans plus tard, cependant, il se retrouve seul pour diriger l’œuvre et assister les nombreuses sœurs déjà entrées, dépourvues de tout moyen de subsistance, avec le danger imminent d’échouer. Le saint homme emploie toutes ses énergies spirituelles, intellectuelles et physiques pour la cause, en luttant contre tous les obstacles, aidé de l’abandon en la Providence divine et de sa foi. Il souffre les peines les plus dures à cause de la mort de beaucoup de jeunes religieuses, et accepte les humiliations les plus cruelles pour son impuissance à les secourir. Dieu apprécie autant de sacrifices et manifeste tout son amour en guidant son pieux serviteur à consolider l’œuvre.

Le Seigneur sauve la fondation, grâce au dévouement héroïque de toutes les premières saintes religieuses, qui suivent l’exemple du père fondateur en s’appliquant avec une fidélité radicale à la règle de vie qu’elles avaient embrassée et en adhérant à la passion avec laquelle il attend de vivre le charisme franciscain partout et surtout dans les terres de mission. Les soins du Père Gregorio sont inlassables pour orienter de nombreuses aspirantes à la vie religieuse et pour former les nouvelles missionnaires, qu’il envoie et soutient avec un zèle paternel dans la lointaine Amérique du Nord (1865) et au proche Orient (1872), en se rendant disponible, pendant ce temps-là, à soutenir l’œuvre pastorale de quelques paroisses vénitiennes, au bénéfice des plus pauvres. Entre temps il est élu à deux autres reprises ministre provincial (1871 et 1875), faisant toujours l’objet d’une pieuse admiration de la part de tout le peuple de Dieu, pour sa vie vertueuse.

Son idéal est la seule gloire de Dieu, la mortification de soi et le service à tous les frères. Il passe ainsi sa vie dans l’effacement et l’humilité exemplaires, en donnant tout et en ne demandant rien, si ce n’est pour soulager les besoins d’autrui, il transmet la richesse de sa figure de franciscain mineur, modelé sur l’esprit de pauvreté du séraphique Père François, dans son engagement de père aimant et d’éducateur diligent. Il vit retiré et discret, ses dernières années dans l’hospice du couvent Sainte Marie des Anges, maison mère des Sœurs Franciscaines Missionnaires du Sacré-Cœur, où la sœur mort le surprend le 23 janvier 1894.

Pour toutes les sœurs, il est le “père et maître” vénéré, et elles conservent le précieux héritage de ses dons d’esprit, de cœur et d’intelligence, tout en sachant, que le mystère profond de la sainteté de sa vie et de son œuvre n’est connu que de Dieu. A Lui toute la louange pour le don et le modèle qu’Il continue à nous indiquer dans son serviteur, père Gregorio !

Laure Leroux de